La danseuse et l’alouette
65 x 50 cm
Dessin aquarellé sur papier. 2024
« De la cour, j’aperçois les deux grands sillons jaunes que projette le chat-phare sur la route. Je tourne à l’angle et, guidé par cette lumière, remonte l’allée des Lilas jusqu’à la rue Grande-Côte. Une femme à l’insolite chevelure m’attend debout devant la fresque. Sa crinière, que de loin j’imaginais ébouriffée, dévoile de près sa véritable consistance. Des branches enchevêtrées de ramures noueuses sont dressées sur son crâne. Je détaille — maintenant que je suis suffisamment rapproché — l’étonnant buisson aux rameaux tourmentés qui ornent la tête de la jeune fille. Je lève les yeux en direction des branchages et dois admettre qu’elle porte à l’emplacement de son cuir chevelu les ramilles d’un noisetier tortueux ; ses mèches contorsionnées possèdent les reflets d’une écorce lisse et soyeuse sous laquelle pointent déjà les premiers bourgeons. Elle a croisé ses longs bras sur son bustier de flanelle ivoire. Sous la mousseline multicolore de son tutu, le fourreau de ses collants galbe ses jambes interminables. J’hésite quant à mon complet réveil. Je secoue la tête à plusieurs reprises. Je dois accepter l’extravagance de cet être qui me dépasse de sa haute taille et qui étend au-dessus de moi, tel un couvert forestier, la ramification spiralée de sa chevelure végétale.
« Bonsoir, Alexis. Je me prénomme Usikamo. Je t’espérais depuis longtemps…
— Comment connaissez-vous mon prén…
— Ne m’interromps pas !
En même temps qu’elle a lancé cet impératif, elle a chassé d’un seul geste la neige qui embarrassait sa tenue. »
Extrait du passant des Heures.